Et si ce n’était pas la faute de vos parents ?

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Je me souviens de ce jour où j’étais allongé dans mon lit, plongé dans une spirale infinie de remises en question. Vous savez, ces questions que vous vous posez souvent à l’âge de 18 ans. Ces questions qui font écho dans votre cœur et qui bouillonnent votre esprit. Ces questions où vous vous demandez pourquoi vous vivez ce que vous vivez jusqu’à vous retrouver en train de jouer en boucle le passage de Howard Beale dans le film « Network » (1976), où il explique à quel point la vie est de la merde.

Nous avons presque tous tenté un jour de blâmer nos parents d’une manière ou d’une autre. Peut-être qu’ils étaient trop conservateurs pour nous partager leurs erreurs. Peut-être qu’ils nous ont frappés plutôt que de nous encourager lorsque nous tentions d’être indépendants. Peut-être qu’ils étaient absents lorsque nous avions réellement besoin d’eux.

Le temps passe et nous prenons de l’âge. Nous traversons la vingtaine en essayant de découvrir qui nous sommes censés être et ce que nous sommes censés faire du temps restant de notre vie.

Cependant, les choses semblent être à notre encontre. Tout ce que nous essayons semble ne pas fonctionner. Nous sommes peut-être trop timides pour occuper ce poste. Nous sommes peut-être trop sensibles pour garder une relation. Nous sommes peut-être trop méfiants pour faire confiance aux autres.

Nous commençons alors à nous remémorer tous les choix que nos parents auraient dû prendre. Ces choix qui nous auraient peut-être permis d’être moins timides pour occuper ce poste aujourd’hui, d’être moins sensibles pour garder cette relation ou d’être moins méfiants pour vivre pleinement avec les autres. Puis, nous veillons la nuit en espérant : « si seulement les choses pouvaient se passer autrement. »

Cependant, nous oublions très souvent de nous demander une chose : « Et si ce n’était pas la faute de nos parents ? »

Découvrons l’influence réelle de nos parents

Ayant été élevé dans un environnement réservé, Jeff avait très peu de discussions intimes avec ses parents. Chaque fois qu’il soulevait une question plus intime, il voyait ses parents esquiver la question comme un skieur évitant les obstacles. En grandissant, il s’est donc mis à penser que ses parents étaient responsables de sa timidité, jusqu’au jour où il a lu une recherche de 1988 qui mettait en éclat les faits.

Après avoir étudié la similitude de personnalité chez des centaines de paires de jumeaux élevés séparément, le psychologue Auke Tellegen et ses quatre collègues affirment qu’environ 45% de notre personnalité et de nos comportements sont basés sur la génétique. Les 55% restants, quant à eux, sont basés sur notre environnement. [2]

C’est assez intéressant en soi.

Cependant, il y a un élément beaucoup plus subtil qui découle de leur recherche : les jumeaux identiques qui grandissent dans la même maison avec les mêmes parents se révèlent également à environ 45% identiques et 55% différents.

Cela signifie donc que nous finissons par être ce que nous sommes, et ce, peu importe qui nous élève. Les méthodes parentales de nos parents n’ont aucun effet notable sur nos traits de personnalité permanents.

Autrement dit, nos parents déterminent les choses superficielles comme la manière dont nous nous habillons, les gens que nous côtoyons ou l’équipe de foot que nous supportons. Cependant, ils ne déterminent pas, par leurs actes, ce qui est plus important, par exemple, notre estime de soi, notre introversion, notre extraversion ou notre névrosisme.

Alors, vous allez me dire maintenant : « comment se fait-il que je ressemble tant à mon père ? »

Je me suis également posé la question.

Eh bien, n’oubliez pas que 50 % de vos gènes sont hérités de lui. Cette timidité que vous pensiez avoir été victime de vos parents parce qu’ils vous ont ignoré toute votre enfance est peut-être simplement due au fait que vos parents sont eux aussi timides et peu expressifs. Donc, ce qui vous rend socialement anxieux est probablement ce qui les rend également socialement anxieux.

Si vous prenez un moment pour analyser les faits, vous découvrirez que la plupart des similitudes entre vous et vos parents peuvent s’expliquer par la génétique et pas nécessairement par le conditionnement ou la parentalité.

Supposons que votre père soit timide et que vous lui reprochez d’avoir fait de vous une personne timide. Après tout, vous avez grandi dans une maison où c’était la norme. Cependant, il s’avère que vous étiez tous les deux prédisposés à être introvertis et non expressifs à travers la même génétique. Ce n’était donc pas un choix conscient de vous ou de votre père.

Mais attendez, cela signifie-t-il que nos parents n’aient aucune influence sur notre résultat ?

Eh bien, non. L’influence est tout simplement beaucoup plus faible que nous avons tendance à le penser.

Étant donné que 45 % de notre personnalité est déterminé par notre génétique, les 55 % restants sont déterminés par notre environnement. Notre relation avec nos parents est en quelques sortes située quelque part dans ces 55 %.

À ce sujet, de nombreuses recherches suggèrent que de façon générale (sont exclues de la recherche les personnes ayant vécu des traumatismes majeurs), notre estime personnelle et notre perception de soi sont davantage influencées par notre groupe de pairs et par notre vie sociale en tant qu’enfant que par nos parents. [3]

En d’autres termes, un mauvais parent dans un bon environnement est mieux qu’un bon parent dans un environnement de merde. L’environnement est donc important.

Un ami m’a dit un jour : « Montre-moi un enfant qui vient d’une famille avec peu ou pas d’implication parentale et je te montrerai presque toujours un enfant en difficulté. »

Ceci est tout aussi valable pour les enfants qui sont constamment protégés par leur parent. La réalité est que vous pouvez foutre en l’air la vie de votre enfant autant en le surprotégeant qu’en le négligeant. [4]

Bien que minime, les parents ont donc une part de responsabilité sur ce que devient leur enfant. Apprenez-en davantage à ce propos en consultant les notes en bas de page. [1]

D’ici là, il y a une question qui tourne dans votre tête depuis un moment à laquelle nous allons devoir répondre.

À qui la faute ?

Quand il était enfant, comme tous les autres enfants, Jeff voyait ses parents comme infaillibles. Ils avaient des réponses à tout et savaient ce qui était juste et ce qui ne l’était pas.

Puis, quelques années plus tard, il a commencé à s’apercevoir que ses parents avaient des défauts. Parfois, de graves défauts.

À mesure qu’il avançait en âge, durant ses vingtaines, il s’est rendu compte qu’il avait aussi des problèmes, dont beaucoup étaient similaires à ceux de ses parents.

Par conséquent, il lui était presque impossible de ne pas établir une sorte de corrélation entre le comportement de ses parents en grandissant et son propre comportement en tant qu’adulte. Ils étaient trop similaires pour être ignorés.

En cherchant sur le sujet et en observant ce qui se passait autour de moi, je me suis rendu compte que la plupart des parents avaient échoué à un certain niveau avec leur enfant. Certains d’entre eux ont vraiment merdé et nous allons tous merder d’une certaine manière. Cela est en partie parce que beaucoup de nos problèmes ont des racines génétiques, mais aussi parce qu’il est tout simplement impossible de contrôler en permanence l’environnement dans lequel grandit un enfant. [5]

Continuer à tenir nos parents responsables de leur influence négative sur nos vies, c’est revenir à l’état d’esprit d’un enfant : un état d’esprit où nous nous croyons en droit de tout arranger pour nous et où nous percevons la responsabilité de notre vie en dehors de nous-mêmes.

Cette façon de voir est compréhensible en soi. Cependant, cette vision doit être abandonnée pour avancer dans la vraie vie d’adulte.

La vraie vie d’adulte commence lorsque nous décidons d’abandonner nos attentes enfantines de ce que nos parents auraient dû accomplir pour nous.

La vraie vie d’adulte prend place lorsque nous abandonnons l’idée que maman et papa nous ont en quelques sortes donné tous nos problèmes et que nous admettons que, peu importe d’où ils viennent, nos problèmes sont les nôtres et que nous sommes responsables de nous-mêmes.

La vraie vie d’adulte se concrétise lorsque nous réalisons que nos parents n’ont pas creusé le trou dans lequel nous nous trouvons aujourd’hui, mais qu’ils ont plutôt essayé de s’en sortir toute leur vie.

Notes 

  1. Ce sur quoi un parent doit se concentrer est de prendre de bonnes décisions avant même d’avoir un enfant. Il peut s’agir de développer des compétences pour gagner sa vie, d’être attentif à l’école, de choisir des amis qui partagent ses valeurs, ou encore, de manger sainement et de rester en forme pour essayer d’empiler le jeu en faveur d’un enfant en bonne santé. Il peut également s’agir, dans la mesure du possible, de développer les relations familiales et amicales à partir de bonnes bases. En gros, il importe de garder la tête bien droite dans un monde qui nous pousse à prendre de mauvaises décisions à chaque coin de la rue. Un parent doit s’assurer de faire des choix de carrière qui lui permettront de passer le temps nécessaire avec son enfant en lui enseignant ses valeurs, en apprenant à le connaître et à le comprendre. Il doit être en mesure de fournir un bon foyer à son enfant. Il doit pouvoir aider son enfant à développer des compétences commercialisables, des compétences de vie qui lui seront utiles dans ce monde en constante évolution. Un parent doit se consacrer à être le meilleur parent possible. C’est sur quoi il a le contrôle.
  2. Tellegen, A., Lykken, DT, Bouchard, TJ, Wilcox, KJ, Segal, NL et Rich, S. (1988). Similitude de personnalité chez les jumeaux élevés séparément et ensemble. Journal de la personnalité et de la psychologie sociale, 54 (6), 1031–1039.
  3. Harris, J. R. (2010). No Two Alike: Human Nature and Human Individuality(p. 195-200). W. W. Norton & Company.
  4. Voir: le concept de « parents d’hélicoptères» et  Segrin, C., Woszidlo, A., Givertz, M., & Montgomery, N. (2013). Parent and Child Traits Associated with Overparenting. Journal of Social and Clinical Psychology, 32(6), 569–595.
  5. All About Parenting and Parenting Styles

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